Après avoir longtemps caressé l'idée de lancer mon entreprise créative, j'ai finalement sauté le pas. D'abord dans ma tête puis dans les mots, devant le miroir puis devant les autres, enfin dans les gestes...
Tout doucement, sans y croire moi-même au départ, juste pour voir, pour tester,... faire "comme si" : concevoir un site web, chercher les bons outils, écouter les podcasts des autres, créer des patrons, se tromper, recommencer... S'amuser, réfléchir sans contrainte. Mais tout de même, à mesure des pas que je posais, l'idée devenait plus forte, plus engageante jusqu'à devenir irrésistible.
Dans ce parcours incertain, j'ai trouvé, au détour d'une recommandation amicale, Mélanie Jung et son club Youpie. Une bien curieuse alchimie s'est installée avec cette coach de business créatif qu'au départ tout semblait opposer à moi.
Eh bien, Mélanie a coutume de dire que la créativité est un acte de guérison envers soi et que concevoir une entreprise créative exprime le souhait de partager cette force de guérison avec les autres.
Pourquoi pas? Elle est comme ça, Mélanie. Elle vous dit des tas de choses qui ne sont ni des mensonges ni des vérités mais des convictions qui donnent à penser. Et pour le coup, cette idée de guérison me parle.
En ce début d'année, affectée à la fois dans ma vie familiale et professionnelle ainsi que sur le plan de la santé, je me suis surprise à connaître des sentiments aigus, comme démesurés. C'est ainsi que lors d'une promenade au parc, une femme inconnue m'a sourit en passant près de moi et m'a lancé un "bonjour!" guilleret que j'ai senti authentique. Authentiquement gentil. Authentiquement tourné vers moi, quidam sans nom ni histoire à ses yeux.
Il n'en n'a pas fallu davantage pour qu'une émotion bienfaisante mais sans contrôle s'empare ce moi et fasse couler quelques larmes sur mes joues. Cet événement a de quoi étonner, n'est-ce pas? Mais en le questionnant, j'en suis arrivée à voir le monde autour de moi comme s'il s'agissait d'une société étrangère, dont les règles de fonctionnement ne me semblaient soudain plus évidentes du tout. J'en suis arrivée à me sentir orpheline de lien avec les autres êtres humains.
La sensation ne m'était pas totalement étrangère. Quelques courts séjours en Tunisie m'avait également fait goûter le bonheur décalé de vivre dans une ville plus chaleureuse, dont les habitants trouvent normal de voir les autres.
Le chauffeur de taxi qui concède un retard pour aider son collègue en panne, le policier qui ajuste une règle pour permettre au chauffeur de circuler plus aisément, le passant démuni qui offre un sou en échange d'un inutile paquet de mouchoirs à la vieille dame assise sur le béton du trottoir...
Offrir un sourire là-bas n'est pas une attitude rare. La solidarité paraît plus qu'un titre sur un programme électoral. Qu'avons-nous de semblable, nous qui croyons tout avoir? Alors cette question m'a taraudée tandis que j'essuyais mes larmes : suis-je devenue vulnérable ou suis-je simplement devenue la femme que j'ai envie d'être? Sensible, ouverte, généreuse. Suis-je malade ou est-ce le monde autour de moi?
Je n'ai pas besoin de répondre à cette question. Je fonde l'atelier créatif Epicureuil pour tester à toute petite échelle des options marginales pour notre société, emprunter des chemins qui se détournent du capitalisme et de son infernal corollaire mortifère : notre condamnation à mort. Notre condamnation à produire et consommer toujours plus.
Bien sûr, la critique est aisée... Epicureuil s'inscrit totalement dans cette logique de vente, et de production, quand bien même je retravaille principalement les déchets pour leur rendre vie. Mais hélas, sans surprise, je n'ai trouvé à notre monde et à ses règles aucune alternative totale. Il me faut donc oeuvrer par petits pas, trébucher parfois et recommencer, sans trop craindre les nécessaires contradictions ni les inévitables mauvais choix.
Le moteur à toute cette démarche, c'est la conviction qu'en apprenant à consommer moins et mieux, nous allons créer de l'espace pour des biens plus précieux et des vies plus heureuses. Ces espaces sont spécifiques à chacun mais la lame de fond est commune : retrouver du lien social et du respect entre nous. Redécouvrir une relation solidaire et bienveillante.
Alors oui c'est mon voeux pour Epicureuil : semer un avenir où les être humains s'apprécient différemment d'aujourd'hui.
"On sème demain, demain on s'aime"
Dans l'offre d'Epicureuil, ce désir pour l'avenir sera porté de différentes façons :
- Créations à base de matériaux recyclés présentant une haute valeur symbolique : des "poupées-miroir" pour se connaître et se souvenir de son potentiel, des invitations à se rapprocher sous formes d'enveloppes mystérieuses, des couronnes et des badges célébrant le plus optimiste des mots : "OUI",...
- Cours et ateliers pour apprendre à aimer son corps, en prendre soin, y trouver du plaisir, des ateliers pour apporter son soutien à d'autres qui en ont besoin : créations à faire ensemble pour Octobre Rose, participation à un repair café textile,...
- Cours et ateliers pour devenir artisan textile : souvent une thérapie à tous les maux ;-)
On sème demain, demain on s'aime